Les résultats obtenus par les centres d’artistes autogérés commentés

Quelques observations du conseil d’administration d’ARCA sur les résultats obtenus par les centres d’artistes autogérés lors du concours 2014-2017 du programme de fonctionnement du Conseil des arts du Canada

Les membres de la Conférence des collectifs et des centres d’artistes autogérés se sont réunis récemment afin d’examiner les résultats de l’évaluation par les pairs du concours d’Aide aux centres d’artistes autogérés pour la période 2014-2017. Les observations suivantes feront l’objet de discussions et d’actions futures.

En bref

Avant de déposer leurs demandes l’automne dernier, les centres ont été avisés que le budget du programme ne serait pas augmenté et que les membres du comité de pairs auraient comme instruction de recommander des ajustements des montants octroyés jusqu’à hauteur de 20 %, selon une politique développée il y a quelques années pour distribuer de nouveaux fonds. Dans le cas présent, cette politique a été appliquée afin d’accorder des augmentations de 5 000 $ à 12 000 $ à 19 centres, et pour recommander des coupures allant jusqu’à 20 % à 29 centres, parmi les 78 candidats retenus. Trente (30) centres ont reçu le même montant que lors de l’évaluation de 2011; si l’on considère l’inflation, cette situation implique en fait une réduction des revenus disponibles.

Un nouveau centre

Parmi les 20 nouveaux candidats à l’Aide aux centres d’artistes autogérés, un seul a été admis à l’aide pluriannuelle. L’ARCA félicite le centre 221A de Vancouver pour cette réussite, même si cette nouvelle stabilité a un prix : celui de devoir renoncer à l’aide aux projets du Conseil des arts du Canada. D’ailleurs cette restriction a souvent été déplorée et la communauté s’interroge sur l’impact de cette situation sur les centres qui reçoivent peu de soutien au fonctionnement. Ce choix de la stabilité plutôt que celui d’un financement parfois plus confortable à projets réaffirme la valeur du programme de fonctionnement pluriannuel et son importance dans le processus de validation des organismes. Il démontre que des membres de la nouvelle génération de centres d’artistes croient en ce soutien et aspirent toujours à obtenir un financement de fonctionnement, même si de nombreux organismes émergents, devant l’absence de nouveaux fonds, se découragent de déposer une demande.

Un contexte favorable à la réussite?

En recensant les résultats de leurs membres, les associations de centres d’artistes autogérés ont constaté et déploré le climat de division créé par ces réallocations de subventions qui réduisent et exacerbent aussi certaines disparités de longue date. Ces réallocations servent aussi à rappeler que cette source de financement en déclin constant peut susciter des malentendus et engendrer une compétition malsaine au sein du secteur. L’annonce d’une coupure, si petite soit-elle, est toujours une mauvaise nouvelle, d’autant plus quand on considère les modestes montants en jeu. Les membres ne peuvent que spéculer sur la possibilité d’ajustements subséquents, particulièrement pour les centres qui doivent déposer une nouvelle demande au printemps 2015, soit dans un an, et qui, selon la politique d’avis raisonnable, pourraient voir leur financement réduit cette fois de plus de 20 %. Ceux invités à déposer à nouveau au printemps prochain seront évalués par le service des arts visuels, avec l’appui d’un pair externe.

Le financement de fonctionnement versé à projets

Bien que le budget global de l’aide pluriannuelle aux centres d’artistes autogérés ait augmenté depuis 2006 ce qui a fait progresser le niveau moyen de financement au fonctionnement dans chacune des associations membres, on note une attrition de 47 300 $ au programme, par rapport au montant de 2011. Le Service des arts visuels a informé l’ARCA que ce montant a été versé au budget des subventions de projet pour les organismes. On confirme, par ailleurs, qu’advenant de nouvelles coupures, les sommes récupérées seraient aussi versées dans le budget des subventions de projet pour les organismes.

Est-ce que ces fonds auraient pu soutenir un centre additionnel ou fournir une aide ponctuelle à un centre à quelques points de se qualifier? Déplacer ces fonds du programme d’aide au fonctionnement vers le programme de subvention aux projets est perçu comme allant à l’encontre de décisions négociées antérieurement.

Les critères d’évaluation

Les résultats soulèvent aussi des questions à propos des standards et des valeurs utilisés par le comité de pairs lorsqu’ils évaluent le mérite. Comment le comité est-il instruit et préparé à faire des ajustements au-delà des objectifs du programme et des critères d’évaluation? Ses décisions tiennent-elles compte des objectifs stratégiques du Conseil? Les résultats mettent en lumière quelques disparités persistantes : entre les régions, à cause d’un développement inégal des organismes subventionnaires, à l’échelle des provinces ou des municipalités, et, entre les groupes linguistiques et autochtones, à cause de contraintes culturelles et démographiques propres aux groupes minoritaires. Le troisième objectif du plan stratégique 2011-2016 du Conseil fait de la promotion de l’équité une priorité et affirme « qu’il interviendra activement dans des circonstances qui requièrent des actions particulières ». On nous rappelle que les questions d’équité et autres priorités du Conseil sont présentées par l’agent du Service au début des délibérations du comité d’évaluation par les pairs et sont utilisées pour assurer que les demandes soient traitées sans préjudices mais, au final, les recommandations sont basées sur les objectifs du programme et les critères d’évaluation, selon les lignes directrices du programme.

Une étude à ce sujet permettrait d’éclairer cette question et approfondir notre compréhension des enjeux de l’équité dans notre milieu.

La révision prochaine du programme de fonctionnement

Étant donné l’insistance sur le « changement » au Conseil des arts du Canada, est-ce que les changements seront laissés à l’initiative de chacun des services selon le processus de révision des programmes de fonctionnement annoncé par la haute direction il y a déjà deux ans? Certains croient qu’il serait utile de faire des révisions dès maintenant, alors que le financement stagne, et éviter de mettre encore plus d’argent dans un programme qui néglige certains de ses membres. D’autres croient qu’il serait mieux d’augmenter le soutien aux centres qui en reçoivent moins, convaincus qu’une plus grande équité rendrait chacun plus compétitif et stimulerait l’innovation. On a aussi exprimé des réserves quant à la révision du programme de fonctionnement craignant que l’exercice augmente l’attrition du programme. Quelle que soit l’approche envisagée par le service des arts visuels, les membres de l’ARCA souhaitent vivement faire partie de la conversation.

En attendant, L’ARCA demandera que toutes réallocations de fonds du programme de fonctionnement soient suspendues, et que ces décisions fassent d’abord l’objet d’une consultation formelle avec la communauté. Dans l’immédiat, Todd Janes, le président de l’ARCA et directeur du centre Latitude 53 à Edmonton, tient à souligner le dynamisme des membres, leur engagement et leur haut professionnalisme, et ajoute « nous nous attendons à ce que nos collègues du Conseil des arts du Canada favorisent le développement de la capacité du milieu et défendent les priorités stratégiques du Conseil plutôt que de susciter la peur et la division! ».

D’un commun accord, les membres de l’ARCA, continueront à appuyer le Conseil des arts du Canada en participant aux efforts de représentation collectifs qui visent une augmentation de l’allocation budgétaire du Conseil, persuadés que seule une telle augmentation pourra assurer la stabilité à long terme des centres d’artistes autogérés.